Rencontre de l'Agam & ARS PACA : Urbanisme et santé, bien vivre en ville
Rencontre de l'Agam & ARS Paca : Urbanisme et santé

Article : Périodique

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Les Cahiers de l'IAU, 170-171 - Territoires, incubateurs de santé ?
![Idées [ID] de villes : Urbanisme et santé](./styles/agam/images/no_image_mu.png)
Publication
santé via Doc AGAM on Inoreader
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Épisode de pollution de l'air à l'ozone: Alerte de niveau 1 dans les Bouches-du-Rhône ce mercredi 27 septembre
À la suite de l'activation d'une procédure d'information-recommandations pour la journée du mardi 26 septembre 2023, le préfet des Bouches-du-Rhône déclenche, pour la journée de mercredi 27 septembre 2023, la procédure d'alerte de niveau 1 relative à un épisode de pollution de l'air à l'ozone.
© Hagay Sobol
Le niveau d'alerte 1 est déclenché en prévision d'un dépassement du seuil d'information pour le 2ᵉ jour consécutif. Les températures élevées et un vent faible associées aux rejets atmosphériques habituels du territoire (émissions routières et industrielles) sont favorables à la formation d'ozone. Cette procédure est assortie de la mise en oeuvre de recommandations sanitaires et comportementales et des mesures suivantes :
Dans le secteur industriel :
Les principaux émetteurs industriels de composés organiques volatils et d'oxydes d'azote mettent en oeuvre les mesures d'urgence de maîtrise de leurs émissions tels que prescrites dans leurs arrêtés préfectoraux, pris au titre du code de l'environnement relatif à la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE).
Dans le secteur des transports :
- Abaissement de 20 km/h des vitesses maximales autorisées sur les voiries, sans toutefois descendre en dessous de 70 km/h.
- Renforcement des contrôles de vitesses.
- Renforcement des contrôles anti-pollution des véhicules.
- Raccordement électrique à quai des navires de mer et des bateaux fluviaux en substitution à la production électrique de bord par les groupes embarqués dans la limite des installations disponibles.
- Diminution des vitesses des navires de 10 noeuds à proximité des bassins et de 8 noeuds à l'intérieur des bassins Est (Marseille) et des bassins Ouest (Fos).
Dans le secteur résidentiel et tertiaire :
- Report des travaux d'entretien ou de nettoyage effectués par la population ou les collectivités territoriales avec des outils non-électriques (tondeuse, taille-haie...) ou des produits à base de solvants organiques (white-spirit, peinture, vernis décoratifs, produits de retouche automobiles...) ;
- Interdiction stricte des brûlages à l'air libre des déchets verts (suspension des dérogations).
- Suspension de l'utilisation d'appareils de combustion de biomasse non-performants ou groupes électrogènes.
Dans le secteur agricole :
Report des épandages de fertilisants minéraux et organiques en tenant compte des contraintes déjà prévues par les programmes d'actions pris au titre de la directive 91/676/CEE du Conseil du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles.
Pour protéger votre santé :
■ Réduisez vos activités physiques et sportives intenses (dont les compétitions) ;
■ En cas de gêne respiratoire ou cardiaque, prenez conseil auprès de votre pharmacien ou de votre médecin ;
■ Si vous êtes sensible ou vulnérable, privilégiez les sorties les plus brèves, celles qui sollicitent le moins d'effort et évitez de sortir durant l'après-midi.
Pour aider à améliorer la qualité de l'air :
■ Limitez vos déplacements privés et professionnels, ainsi que l'usage de véhicules automobiles en privilégiant le covoiturage et les transports en commun ;
■ Privilégiez les trajets courts et les modes de déplacements non-polluants (marche, vélo...) ;
■ Respectez l'interdiction des brûlages à l'air libre et l'encadrement de dérogations ;
■ Maîtrisez la température dans les bâtiments (chauffage ou climatisation) ;
■ Reportez les travaux d'entretien ou nettoyage nécessitant l'utilisation de solvants, peintures ou
vernis.
La pollution de l'air : quels impacts sur la santé ?
Une exposition de quelques heures à quelques jours à un pic de pollution peut entraîner des irritations oculaires ou des voies respiratoires, des crises d'asthme et une aggravation des troubles cardio-vasculaires ou respiratoires. Cette exposition peut avoir des effets très négatifs pour des personnes particulièrement vulnérables, notamment les femmes enceintes, les nouveaux-nés et les personnes atteintes de maladies respiratoires.
- Abaissement de 20 km/h des vitesses maximales autorisées sur les voiries, sans toutefois descendre en dessous de 70 km/h.
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Les PHAs, des plastiques plus respectueux des écosystèmes et de la santé humaine
Les PHAs, ces plastiques biosourcés, biodégradables et recyclables, sont une solution prometteuse pour la pollution plastique.
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Vélo, bus, tram... Votre moyen de transport influence aussi celui de votre entourage
Si vous vous rendez à votre travail à vélo, il y a de fortes chances que certaines personnes de votre entourage vous imitent également. Dovile Ramoskaite / Unsplash
La voiture reste le moyen de transport majoritaire pour les trajets domicile-travail (73 %), et ce y compris pour des distances de moins de 5 kilomètres, qui pourraient être facilement couvertes grâce à des modes de déplacement alternatifs. Entre 2015 et 2020, la part modale du vélo (c'est-à-dire le pourcentage de déplacements effectués en vélo) n'a augmenté que de 0,9 point de pourcentage, pour passer de 2 % à 2,9 %.
Ce constat pose la question de l'efficacité des politiques qui ambitionnent de développer l'usage des modes de transports durables et des mobilités dites « actives », autrement dit les mobilités qui s'accompagnent d'une activité physique. Il peut s'agir non seulement de la marche ou du vélo, mais aussi des transports en commun : en moyenne, en effet, un trajet en bus, en tramway ou en train nécessite de marcher au moins une dizaine de minutes, en fonction de l'éloignement des arrêts.
Ces politiques, qui visent à amener les individus à adopter d'autres comportements, ont jusqu'à présent suivi deux voies principales : une approche punitive (taxe carbone, zones à faibles émissions visant à exclure certains véhicules) ou une approche incitative, mais d'un point de vue strictement monétaire (forfait mobilité durable).
Or nos travaux indiquent qu'il existe d'autres approches possibles, telles que le recours à l'influence sociale ou aux arguments de santé individuelle. En les croisant, il pourrait être possible de renforcer l'efficacité des interventions publiques. Explications.
L'importance de l'entourage personnel
Divers travaux de recherches ont suggéré que l'influence sociale pourrait constituer un levier important dès lors qu'il s'agit d'inciter à l'adoption d'une mobilité active.
Le problème est que jusqu'à récemment, les interactions sociales étaient évaluées en fonctions de facteurs tels que l'appartenance à un même quartier d'habitation, par exemple. Or, ce type de critères ne permet pas de résumer à eux seuls l'influence sociale.
Cette dernière peut aussi s'exercer notamment à travers le plaisir que l'on peut ressentir lorsque l'on prend les transports en commun avec des collègues que l'on apprécie. C'est ce que l'on nomme la complémentarité stratégique : Carole aime prendre le tram avec Béatrice, car il s'agit d'un moment qui leur permet de discuter du dernier épisode de leur série préférée...
L'influence sociale peut aussi s'exprimer à travers le désir de se conformer aux comportements de son entourage direct : tous les amis d'Anna font du vélo pour se rendre au travail, cela l'incite à faire de même afin de ne pas être la seule à venir en voiture.
Pour décrypter le rôle de l'influence sociale, il est donc important de pouvoir identifier l'entourage spécifique de chaque individu (amis, collègues, famille, etc.). C'est ce à quoi s'est attaché le projet de recherche ResCampus, réalisé auprès du personnel du campus universitaire grenoblois.
Notre mode de transport influence celui des autres
Nous avons dans un premier temps collecté des données visant à identifier les collègues avec lesquels chacun interagit sur son lieu de travail, que ce soit lors du déjeuner ou des pauses café, par exemple. Ces informations nous ont ensuite permis de mettre en évidence l'impact de l'influence sociale en matière de choix de transports.
Plus précisément, nous avons démontré que lorsqu'une personne adopte un mode de transport actif, les individus avec lesquelles elle interagit sur son lieu de travail ont une probabilité plus importante d'utiliser elles aussi un mode actif de transport (+24 % en moyenne dans notre échantillon).
On estime que cet effet est principalement dû à la conformité vis-à-vis des pratiques de mobilité de l'entourage professionnel : les changements de comportements individuels de mobilité entraînent des évolutions des normes sociales au sein de l'entourage des individus, ce qui les incite à leur tour à modifier leur mode de transport.
Mode de déplacement principal pour se rendre au travail selon les distances à parcourir. Insee -- droit réservés
L'influence sociale favorise donc le développement de la mobilité active. Or, ce type de mobilité a un impact positif sur l'environnement et le cadre de vie commun, ainsi que sur la qualité de vie personnelle et sur la santé. Ce qui constitue un autre levier activable pour inciter au choix des mobilités actives...
La santé, autre levier motivationnel
L'argument de la santé individuelle constitue lui aussi un levier motivationnel important dès lors qu'il s'agit d'inciter au développement des mobilités actives.
Alors que prendre sa voiture tous les jours renforce la sédentarité, le développement du vélo, notamment grâce au déploiement des aménagements urbains et à l'avènement du vélo électrique, permet une activité physique régulière.
Il est aujourd'hui admis qu'activité physique ne rime pas seulement avec meilleure santé, mais aussi avec qualité de vie et bien-être améliorés.
Or, ces bienfaits sur la santé sont source de motivation individuelle et constituent alors un premier levier pouvant initier des changements de comportements.
Autrement dit, on n'abandonne pas sa voiture à cause des externalités négatives liées à son usage (pollution, bruit...), mais plutôt parce que les alternatives, le vélo ou la marche à pied, sont agréables et bénéfiques pour sa santé et son bien-être.
À lire aussi : Pollution de l'air : diviser par trois la mortalité tout en étant économiquement rentable, c'est possible !
Ce phénomène s'explique notamment par la théorie de l'autodétermination, qui postule que de nouveaux comportements sont davantage adoptés s'ils sont associés à un sentiment de choix et de libre arbitre plutôt qu'à une perception d'obligation et de contrainte.
Faire « boule de neige »
En s'appuyant sur ces constats, les pouvoirs publics devraient donc orienter leurs actions afin que la mobilité soit davantage perçue par les citoyens comme un comportement de santé, et pas seulement comme un comportement « durable ».
À ce titre, le nombre d'interventions publiques mettant l'accent sur les bénéfices sanitaires de la mobilité active pourrait être accru. Il peut s'agir non seulement de concevoir des campagnes d'information, mais aussi d'organiser des « challenges mobilité ». Lors de ces événements, une journée par an, les salariés d'une entreprise sont incités à utiliser un mode de transport alternatif à la voiture pour leur déplacement domicile-travail.
Du coaching individualisé peut aussi être mis en place, afin de fournir des informations et des conseils spécifiques, basés sur la compréhension des besoins individuels et des habitudes de déplacement de chacun. Ainsi, lors de la mise en place de la Zone à Faibles Émissions à Grenoble, l'agglomération a déployé un dispositif d'accompagnement tourné vers le changement de mobilités, dont les usagers peuvent bénéficier en prenant rendez-vous avec un conseiller mobilité.
En s'appuyant sur ce socle de base, l'influence sociale pourrait dans un second temps démultiplier l'impact de ces politiques via des effets « boules de neige », notamment sur les lieux de travail, où les interactions sociales amplifient la diffusion des bonnes pratiques, comme l'ont révélé nos travaux.
Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.
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Comment limiter la pollution sonore au bureau ?
Au-delà de la performance fonctionnelle, les espaces de travail doivent désormais favoriser une expérience collaborateurs qui répond à leurs attentes de bien-être et de resocialisation. Car la période Covid les a dispersés, comme l'a notamment révélé le récent mouvement de limitation des possibilités de télétravail. Les espaces de travail constituent donc de plus en plus des leviers d'engagement, d'attraction et de rétention.
En parallèle, l'acoustique est aujourd'hui davantage considérée comme un élément important du bien-être individuel et de qualité de la vie collective au travail. Dans un contexte de prise de conscience généralisée de la dégradation de notre environnement et de ses impacts pour l'homme, la pollution sonore fait plus largement partie des nouvelles nuisances, multipliée par 10 depuis les années 1980 dans les pays développés.
Un actif sur deux concerné
En conséquence, près de 10 millions d'individus en France sont exposés en moyenne sur l'ensemble de la journée à un très fort niveau de bruit. Les conséquences sociales du bruit, toutes origines confondues, sont aujourd'hui évaluées à plus de 147 milliards d'euros par an par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), qui alerte dans son rapport sur le sujet publié en 2021 :
« Au-delà de l'idée que le confort sonore apporte un plus, il s'agit de comprendre que la pollution sonore est un problème de santé publique ».
En plus de formes de surdités ou d'apparition d'acouphènes, une exposition sonore trop forte et/ou trop longue peut entraîner une perturbation du sommeil, du stress, de l'anxiété, des maux de tête ou même du retard dans les apprentissages.
À lire aussi : De décibel en décibel, comment le bruit gêne-t-il les enfants en classe ?
Le monde de l'entreprise n'est évidemment pas épargné par ce phénomène. Aujourd'hui, environ un actif sur deux se déclare personnellement gêné par le bruit sur son lieu de travail, un chiffre stable depuis plusieurs années. Selon les personnes concernées, les nuisances sonores engendrent de la fatigue (pour 66 % d'entre eux), du stress (56 %) ou encore des problèmes de compréhension dans la communication (48 %).
Pourtant, ces effets désirables ne sont pas une fatalité. Par exemple, une étude clinique menée en milieu hospitalier auprès d'un échantillon de patients dialysés a montré que, dans un espace traité par des solutions acoustiques adaptées, la gêne sonore est divisée par deux et les maux de tête par dix.
Évaluer puis corriger
Quelles sont ces solutions ? Tout d'abord, il est important de prendre conscience des enjeux au travers de systèmes de mesure de la nuisance sonore. Comme le montre l'étude menée auprès des dialysés, au-delà des tests de validation classiques des temps de réverbération ou des niveaux sonores moyens, il est aujourd'hui possible de quantifier l'impact de solutions acoustiques au regard de notions plus proches de la qualité de vie que du respect de normes souvent minimalistes dans leurs seuils.
Ces solutions logicielles vont quantifier la gêne et la fatigue auditive de l'ouïe d'un individu en tenant compte au mieux de sa vulnérabilité individuelle, de son environnement en usage, de son activité du moment et de sa durée d'exposition.
Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s'interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».
Ensuite, après la mesure vient la correction. De nombreuses solutions techniques de parois, panneaux muraux et plafonds, claustra et cloisonnettes mobiles ou fixes sont désormais disponibles. Les innovations récentes concernent notamment des technologies qui prennent en compte les basses et très basses fréquences, particulièrement insidieuses et nocives pour la santé auditive. L'amélioration de la perception sonore porte ainsi sur tout le spectre auditif.
De même, des « phones box » (cabines pour passer des appels) sont apparues avec la multiplication des visioconférences, y compris au bureau. Ce terme générique englobe tous les mobiliers acoustiques qui permettent de s'isoler des autres pour passer ses appels téléphoniques, des visios, seul ou même à plusieurs. Du simple fauteuil à la « bulle » de travail, ces espaces d'isolation deviennent entièrement équipés au niveau du mobilier, de l'éclairage, de la connectique, de l'aération et bien sûr de l'isolation sonore. Certains sont même autoportants, modulaires et déplaçables !
Exemple de cabine pour s'isoler dans un espace ouvert. Wikimedia, CC BY-SA
Enfin, apparaissent depuis peu des solutions d'alerte et de régulation sonore dans un milieu professionnel. Des dispositifs simples et légers, à l'image de celui proposé par la société danoise Jabra JN, indiquent en temps réel le niveau sonore et signalent visuellement si les seuils de tolérance sont dépassés, au travers d'indicateurs de couleur (vert, orange rouges). Ces nouveaux outils ont un impact pédagogique, et visent à influencer le comportement humain.
Une responsabilisation individuelle et collective
En effet, on observe qu'au-delà de la sensibilisation et de la prise de conscience, les collaborateurs se corrigent de manière autonome en cas de niveau sonore trop élevé et adoptent progressivement des comportements plus respectueux dans un espace collectif. C'est en tout cas ce que prouvent les récentes installations en open space faites chez Orange Innovation et Orange France à Meylan (Isère).
Les messages sonores restent indispensables à notre activité cognitive. Cela dit, ils doivent véhiculer l'information au cerveau avec un minimum d'interférence avec des bruits parasites. Au-delà des quelques outils qui se déploient actuellement, à nous de nous responsabiliser, individuellement et collectivement pour respecter les équilibres naturels et en particulier celui de l'équilibre sonore, garant d'un confort acoustique qui améliore la qualité de la cognition, réduit l'irritabilité et améliore donc le rapport aux autres.
En réduisant la gêne sonore, c'est l'équilibre humain, l'état émotionnel, l'empathie, l'attention aux autres, la qualité de la relation et donc le mieux vivre ensemble qui en bénéficient. Un cercle vertueux d'épanouissement individuel et donc de performance collective dans l'entreprise.
Franck Fumey, CEO chez Continuum, entreprise spécialisée dans les solutions acoustiques, a participé à la rédaction de cet article.
Thierry Picq ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
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Vers des plastiques biodégradables et recyclables ? La piste des « PHAs » progresse
Les plastiques sont omniprésents dans notre vie de tous les jours. Leur production ne cesse de croître depuis 1950 et atteint aujourd'hui plus de 460 millions de tonnes par an. Malgré les préoccupations environnementales et sociétales liées aux déchets plastiques, leur consommation devrait plus que doubler d'ici à 2060 pour atteindre 1 231 millions de tonnes annuelles.
Aujourd'hui, il est difficile de se passer des plastiques, notamment pour des raisons d'hygiène et de sécurité alimentaire et médicale. Grâce à leurs propriétés ajustables, ce sont aussi les matériaux les plus produits au monde derrière le ciment et l'acier, avec des applications innombrables dans notre vie quotidienne : emballages, construction (adhésifs, revêtements, canalisations, fenêtres, isolation...), mobilité et transports (automobile, aviation, nautisme...), électronique et électrique (téléphone portable, appareils ménagers...), énergie, agriculture, santé et soins, textile entre autres. En Europe, la France figure parmi les pays les plus gros consommateurs de plastiques, avec 70 kilogrammes utilisés annuellement par habitant.
Mais, sur les environ 8,3 milliards de tonnes de plastiques produites dans le monde au cours des 70 dernières années, 50 % sont à usage unique, seulement 12 % sont incinérés et moins de 10 % sont recyclés. De nombreux déchets plastiques se retrouvent disséminés sur la terre, dans les océans, les rivières et les lacs, et persistent durant des dizaines voire des centaines d'années, ce qui met en danger les écosystèmes, la santé publique et la sécurité sanitaire au niveau mondial.
À lire aussi : Recyclage et valorisation des déchets plastiques : comment ça marche ?
En avril dernier, les pays du G7 se sont engagés à réduire à zéro leur pollution plastique d'ici à 2040. Au-delà des efforts législatifs et de ceux des citoyens, il s'agit d'aller vers une économie circulaire : supprimer les plastiques jetables et non recyclables et optimiser l'ensemble de leur cycle de vie (de la conception à la fin de vie).
Parmi les diverses solutions envisagées par les chercheurs, les polyhydroxyalcanoates, dits PHAs, constituent une famille de plastiques qui a le vent en poupe : les PHA naturels sont extraits des plantes, mais ils peuvent être aussi produits par biosynthèse ou par synthèse chimique. Actuellement, les chimistes des polymères optimisent les PHAs en les rendant notamment moins friables, thermiquement plus stables et surtout recyclables.
Qu'est-ce qu'un plastique « éco-conçu » ?
Pour développer des plastiques respectueux des écosystèmes, de la biodiversité et de la santé humaine, il nous faut non seulement limiter leur usage au strict nécessaire, favoriser leur réemploi, leur recyclage, mais aussi repenser leur conception, dans un contexte de circularité et de durabilité.
Des couverts en plastique biodégradable. drea, Flickr, CC BY-SA
Les PHAs sont très variés. S'ils ne peuvent pas remplacer tous les plastiques traditionnels issus de ressources fossiles, ils présentent des propriétés intéressantes, qui permettent déjà leur utilisation, notamment comme plastiques à usage unique : emballages, sutures, pailles, cuillères, fourchettes et gobelets alimentaires.
Cette capacité à être modulés est importante, car c'est la variété de leurs propriétés intrinsèques qui a permis le déploiement extensif des plastiques traditionnels : légèreté, résistance, durabilité, malléabilité, et pour certains, bien connus du grand public et utilisés en très grand volume, de faibles coûts (polyéthylène, polystyrène, PVC, PET...)
À lire aussi : Vieux caoutchouc cherche nouvel emploi
Mais alors, quand ils sont à usage unique, pourquoi les PHAs sont-ils plus vertueux que des plastiques issus de ressources fossiles ?
Pour deux raisons : d'abord, certains sont dérivés de la biomasse, c'est-à-dire que l'on peut les fabriquer à partir de canne à sucre, maïs, huiles de cuisson usagées par exemple. Ensuite, ils sont biodégradables notamment dans l'eau de mer ou douce et compostables (dans certaines conditions) : ils se dégradent dans tous les milieux (compost, sols, eau) de façon comparable ou plus rapidement que la cellulose.
En fin de vie, on peut bien sûr les incinérer (comme environ 12 % des déchets plastiques produits à l'échelle mondiale depuis 2015) ou les biodégrader.
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Et on sait aussi les recycler : les dernières avancées en recherche montrent qu'il est possible de préparer à grande échelle en laboratoire (quelques centaines de grammes), à partir de ressources renouvelables, des PHAs plus flexibles que ceux commercialisés actuellement, stables thermiquement, tout en étant dégradables. Leur dégradation permet de retrouver les monomères initiaux, à partir desquels les polymères peuvent être à nouveau produits, et ce sur plusieurs cycles, dans des conditions industrialisables douces. Précisons toutefois que ces nouveaux PHAs ne sont pas encore produits industriellement.
De tels PHAs présentent un cycle de vie en boucle fermée, un avantage significatif par rapport aux polyoléfines actuels (plastiques issus de ressources fossiles, pas (voire peu) dégradables) dont ils présentent des performances voisines, et ouvrent ainsi potentiellement la voie à une solution durable et circulaire à la problématique des plastiques.
Ainsi, le marché des PHAs produits à l'échelle industrielle devrait augmenter au cours des cinq prochaines années de 32,14 kilotonnes en 2023 à 92,41 kilotonnes en 2028, ce qui représente un marché potentiel de 195 millions de dollars.
Comment obtenir des PHAs aux propriétés suffisamment variées pour peu à peu remplacer les autres plastiques
Au sens chimique, les PHAs appartiennent à la famille des polyesters : ils présentent une fonction ester (C=O-O) qui est hydrolysable et permet ainsi la dégradation et le recyclage.
On les trouve dans la nature, où ils sont produits par une variété d'organismes, notamment par fermentation bactérienne des glucides ou des lipides (sucres ou huiles végétales). Ils servent de nutriments et de source d'énergie et font partie du métabolisme des organismes vivants (plantes, animaux, humains).
Les PHAs peuvent aussi être obtenus par synthèse chimique, par des réactions de « polymérisation » : des réactifs appelés monomères (les briques constitutives, éventuellement biosourcées) s'enchaînent les uns aux autres par des liens chimiques pour former le polymère. La voie chimique permet d'élargir et de diversifier la plate-forme des PHAs actuels, notamment en introduisant des substituants et/ou des groupes fonctionnels sur chaque unité de répétition qui constitue le squelette du polymère, ou encore en associant différents types de monomères au sein d'un même polymère (on parle alors de copolymère).
Dans nos dernières recherches développées à l'Institut des Sciences Chimiques de Rennes (CNRS/Université de Rennes), nous avons par exemple montré que l'introduction de soufre dans les PHAs conduit à des polythioesters (présentant une fonction « thioester » (C=O-S) plus facilement dégradable que celle d'un polyester) avec une stabilité thermique distincte de celle de leurs analogues oxygénés les PHAs.
Les réactions de polymérisation, conduisant à un polymère ou copolymère de microstructure chimique bien définie au sein duquel l'enchaînement de chacune des briques de monomères est contrôlé, peuvent être réalisées grâce à l'emploi de « catalyseurs » spécifiques (des composés organiques ou métalliques qui promeuvent la réaction chimique). Les propriétés thermiques (température de fusion, de dégradation) et mécaniques (dureté, souplesse, élongation...) de tels PHAs réguliers peuvent ainsi être modulées selon l'application envisagée.
Ainsi, nous avons récemment montré le rôle essentiel du catalyseur de polymérisation, combiné à la présence de groupes sur le monomère initial, pour obtenir des PHAs avec ces substituants positionnés avec régularité le long de la chaîne principale du polymère, qui présentent alors des caractéristiques thermiques ajustables.
Sophie Guillaume est membre (ancienne présidente) du Groupe Français des Polymères (GFP) et de la Société Chimique de France (SCF), et représentante nationale à la Division Polymères de l'Union internationale de chimie pure et appliquée (IUPAC), sans en recevoir de financements. Le groupe de recherche de S. Guillaume reçoit des financements du CNRS, de l'Université Rennes, de la région Bretagne, de Rennes Métropole, de l'ANR, de l'Europe et de certaines entreprises (de gré à gré) dans le contexte de ses activités de recherche, mais sans aucun financements directs.
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Pollution et malbouffe : les cancers explosent chez les jeunes
En trente ans, les cancers chez les jeunes ont grimpé de 80 %. Les principaux responsables : les polluants environnementaux et une mauvaise alimentation, analyse le Dr Jean-David Zeitoun.
Lire la suite - Entretien / Pollutions , Santé
Les chiffres sont alarmants : en trente ans, l'incidence des cancers chez les personnes âgées de moins de cinquante ans a bondi de 79 %, le nombre de décès associés de 28 %, et les pays industrialisés semblent particulièrement touchés, révèle une large étude publiée dans le journal médical BMJ Oncology le 5 septembre. (...) -
Réutilisation de l'eau en France : des avancées en vue ?
Sécheresses, épisodes caniculaires, mégafeux, les phénomènes météorologiques extrêmes se multiplient... Simultanément, l'eau devient plus rare, notamment en période estivale où se concentre l'essentiel des besoins (irrigation, eau potable et autres usages de l'eau). Alors que la baisse probable des débits moyens annuels des cours d'eau devrait atteindre 10 % à 40 % dans les prochaines décennies, les techniques de réutilisation des eaux usées traitées (REUT) font l'objet d'une attention renouvelée des pouvoirs publics qui ont défini, en juin 2019, un objectif de triplement des capacités nationales à l'horizon 2025. Reste que la France peine à rattraper son retard. En 2019, Futuribles s'était penché sur les enjeux et défis à relever ; depuis, la situation hydrique s'est aggravée et certaines communes françaises connaissent de réelles pénuries d'eau. Il est donc utile d'évoquer le bilan des actions entreprises. Où en sont les efforts pour lever les obstacles réglementaires et techniques ? Jérôme Harmand, animateur du réseau REUSE de l'INRAE, et Bruno Molle, conseiller de l'European Irrigation Association (EIA), répondent aux questions de Futuribles.
Avec seulement 0,6 % des eaux usées traitées réutilisées en 2019, la France était jugée très en retard sur ses voisins (8 % en Italie et 14 % en Espagne). Le plan Eau lancé cet été par le gouvernement a pour objectif de parvenir à 10 % en 2030. Mais la réglementation nationale est souvent désignée comme un frein, et des débats existent quant à la pertinence de réutiliser les eaux usées qui servent aussi au maintien des étiages des cours d'eau. Quelle est votre analyse en la matière ?
Jérôme Harmand : Poser un objectif chiffré à un horizon assez proche (ici 10 % en 2030) donne certes une impulsion pour améliorer les choses, mais peut aussi poser problème car on se trouve alors dans une situation d'urgence, qui détourne d'une réflexion de plus long terme, plus systémique. Le risque est de se cantonner à appliquer ce que l'on sait faire, sans remettre fondamentalement en cause l'ensemble des savoirs et donc des possibilités en matière de retraitement des eaux usées par exemple, opter pour une approche très technologique, potentiellement très consommatrice d'énergie...
Par ailleurs, du point de vue réglementaire, le principal problème est que les textes récents restent dans la droite ligne de la définition de la REUT que nous avons en France, qui pose comme condition préalable de disposer « d'eaux usées traitées », donc uniquement disponibles en sortie de station d'épuration. De ce fait, la REUT reste cantonnée à un champ d'application restreint.
Mais le sujet est complexe puisque, effectivement, on entend souvent l'argument selon lequel il est indispensable de limiter la réutilisation des eaux usées à des situations dans lesquelles l'eau en sortie de station n'est pas nécessaire au maintien des étiages des rivières. C'est oublier un peu vite que s'il est des contraintes en aval, un mètre cube d'eau réutilisé est un mètre cube non mobilisé, et donc épargné pour la ressource... Cet argument sur les étiages peut aller à l'encontre de mesures de sobriété qui sont pourtant mises en avant régulièrement. Dans les habitations, on peut assez facilement collecter l'eau des douches et les utiliser pour les toilettes. Cette simple mesure entraînerait une diminution de 10 % à 15 % de l'eau consommée annuellement par une famille de quatre personnes.
Voir aussiBruno Molle : Pour compléter ce point, il est vrai, et il faut le rappeler, que dans pas mal de situations et de zones arides, les rejets des stations d'épuration contribuent fortement au maintien de l'étiage. Les agences de l'eau ont bien compris cet enjeu et ne donnent leur aval à des projets de REUT que si ceux-ci apportent la preuve qu'ils permettent, grâce à leur REUT, une substitution de prélèvement d'eaux de bonne qualité.
J.H. : Mais côté réglementation, les choses avancent un peu. Ainsi, dans les derniers décrets consacrés à la REUT, on trouve les évolutions suivantes : au lieu de définir les usages autorisés, le décret du 26 mars 2022 précise ceux qui ne le sont pas ; autrement dit, il étend de facto les usages des eaux usées jusque-là explicitement autorisés (irrigation agricole, irrigation des espaces verts...) à de nouveaux usages comme le nettoyage des réseaux, des rues ou des véhicules de ramassage des ordures, etc., tout en simplifiant la procédure d'autorisation. Ceci constitue une avancée non négligeable. Pour obtenir cette autorisation de nouveaux usages des eaux usées traitées, il est nécessaire de fournir un dossier technique qui prouve que ces utilisations ne présentent aucun danger pour la santé humaine et pour l'environnement. Ce dossier doit démontrer que les eaux usées traitées ne causeront pas de problèmes sanitaires ni de dommages à l'environnement lorsqu'elles seront utilisées à des fins spécifiques, comme le nettoyage de véhicules, et il nécessite un travail important sur l'établissement de normes de qualité pour chaque usage [1]. Enfin, le ministère de la Transition écologique a annoncé, le 18 août 2023, la publication d'un décret, effective le 29 août, visant à simplifier les procédures administratives pour favoriser la réutilisation des eaux usées en France. Par rapport à la version initiale du texte (de mars 2022), afin de limiter au maximum les freins aux projets de réutilisation, on note que l'avis conforme de l'autorité régionale de santé est abandonné, de même que la limitation de l'autorisation préfectorale à cinq ans.
En 2020, l'Union européenne (UE) s'est dotée d'un règlement visant à faciliter la REUT, en particulier pour l'irrigation agricole (hors espaces verts). Ce texte est entré en vigueur récemment, en juin 2023. Peut-il changer la donne ?
J.H. : Non, je dirais qu'après l'adoption du règlement de la Commission européenne sur la REUT, il existe, au contraire, une pression supplémentaire avec la mise en place de nouveaux freins réglementaires. Si le recours aux eaux usées est présenté comme étant facilité par ce règlement, dans les faits, les normes sanitaires imposées sur les bactéries sont beaucoup plus strictes dans le règlement européen que dans les textes qui régissaient jusqu'alors la REUT en France.
B.M. : Effectivement, la tendance n'est pas vraiment à la levée des barrières réglementaires. On observe plutôt la réglementation européenne prendre le pas progressivement sur la réglementation nationale ; et elle la renforce, en la rendant plus stricte, allant même jusqu'à exiger des qualités d'eau pour la REUT supérieures à celles exigées pour une bonne eau de baignade (par exemple sur la bactérie E.Coli). Elle impose par ailleurs, à court terme (2025), de mettre les installations existantes en conformité.
Voir aussiEn 2020, l'Union européenne (UE) s'est dotée d'un règlement visant à faciliter la REUT, en particulier pour l'irrigation agricole (hors espaces verts). Ce texte est entré en vigueur récemment, en juin 2023. Peut-il changer la donne ?
J.H. : Non, je dirais qu'après l'adoption du règlement de la Commission européenne sur la REUT, il existe, au contraire, une pression supplémentaire avec la mise en place de nouveaux freins réglementaires. Si le recours aux eaux usées est présenté comme étant facilité par ce règlement, dans les faits, les normes sanitaires imposées sur les bactéries sont beaucoup plus strictes dans le règlement européen que dans les textes qui régissaient jusqu'alors la REUT en France.
B.M. : Effectivement, la tendance n'est pas vraiment à la levée des barrières réglementaires. On observe plutôt la réglementation européenne prendre le pas progressivement sur la réglementation nationale ; et elle la renforce, en la rendant plus stricte, allant même jusqu'à exiger des qualités d'eau pour la REUT supérieures à celles exigées pour une bonne eau de baignade (par exemple sur la bactérie E.Coli). Elle impose par ailleurs, à court terme (2025), de mettre les installations existantes en conformité.
Que faudrait-il faire pour améliorer la situation ?
J.H. : pour avancer vers une normalisation, il faudrait repenser entièrement le statut de l'eau, afin de permettre la réutilisation de toutes les eaux, moyennant des traitements spécifiques pour chaque usage. Cette nouvelle définition aurait le mérite de faire sortir la REUT d'un statut à part et de l'inclure dans le champ des outils à mettre en oeuvre pour améliorer l'économie circulaire de l'eau. Elle nécessite toutefois un travail très important sur les normes de qualité qui devraient s'appliquer en fonction de chaque usage. Or, ces réflexions restent très timides en France, notamment en raison du poids prépondérant des avis rendus par les agences de santé.
B.M. : La réglementation devenant beaucoup plus stricte, nous devons nous préoccuper des moyens d'y être moins exposés. Un point doit, à mon sens, retenir une attention particulière : cette réglementation se focalise sur les pollutions bactériennes et virales principalement, or celles-ci sont différentes en fonction des effluents ; une séparation de ces effluents à la source (eaux grises, eaux jaunes, eaux noires), à l'instar du tri des déchets ménagers, permettrait une réutilisation facilitée et la mise en oeuvre d'une économie circulaire des effluents significativement plus performante. Il permettrait, en particulier en zone rurale, de valoriser l'azote et le phosphore particulièrement présents dans ces eaux. Or, ces nutriments coûtent cher à l'achat pour les agriculteurs, mais pas seulement : l'azote a aussi un coût énergétique important lorsqu'il s'agit de l'éliminer en station d'épuration ou de le produire pour en faire des fertilisants, et le phosphore est produit dans des mines, avec un pic de production qui pourrait être atteint avant 2050.
Les coûts des investissements nécessaires à la REUT, notamment en termes de désinfection et d'installation de réseaux de distribution, sont souvent perçus comme prohibitifs, notamment en milieu rural. Quelle technique faudrait-il retenir ou développer, en particulier ?
J.H. : Parmi les différentes solutions possibles, l'un des groupes de travail de l'ASTEE (Association scientifique et technique pour l'eau et l'environnement) recommande, dans les zones rurales, la recharge de nappes, une technique qui consiste à réinjecter les eaux usées traitées dans les nappes souterraines. Les apports de cette technique pour l'agriculture pourraient être majeurs, car avant d'être réinjectées dans les nappes, les eaux usées subissent un traitement avancé, ce qui peut entraîner une amélioration de la qualité de l'eau souterraine. Une meilleure qualité de l'eau peut être bénéfique pour l'irrigation, car elle réduit le risque d'apport de contaminants aux cultures. Une autre piste pour l'agriculture est d'utiliser l'eau traitée au plus près des lieux de rejet, avec des systèmes adaptés (on parle de systèmes décentralisés de traitement) : le principal obstacle à lever est de savoir comment traiter les eaux de manière à enlever les composés indésirables tout en conservant les nutriments, ce qui apparaît encore compliqué aujourd'hui...
B.M. : La question des micropolluants, comme celle de leurs produits de dégradation, est présente ici aussi et commence à préoccuper les décideurs. De nombreux travaux sont en cours pour comprendre leur comportement dans le sol, voire leur passage dans les plantes, et se heurtent aux problèmes posés par les très faibles concentrations en jeu. Les essais conjoints de l'INRAE et HSM (HydroSciences Montpellier) montrent cependant que la barrière biologique demeure efficace contre certains de ces polluants.
Existe-t-il des exemples à l'étranger des pays dont la situation serait comparable et ayant investi dans ce domaine dont la France pourrait s'inspirer pour améliorer la réutilisation de ses eaux usées ?
J.H : Il faut bien être conscient que c'est avant tout la nécessité et le pragmatisme là où la ressource se fait rare qui poussent la réutilisation des eaux usées. Ainsi, de nombreux pays sont confrontés à un déficit d'eau chronique qui les a amenés, très tôt, à réutiliser leurs eaux usées. Selon la situation économique des pays, les approches mises en oeuvre peuvent être très différentes : très technologique dans les pays développés (États-Unis, Israël, Singapour...) ; nettement moins poussée dans les pays en développement (par exemple au Maghreb). Dans les faits, quel que soit le pays considéré, à l'exception de quelques très rares cas de graves dysfonctionnements, les retours d'expérience sont très positifs. On ne note surtout quasiment aucun exemple de contamination humaine par des pathogènes qui proviendraient de l'eau réutilisée. Il est frappant que les réglementations récentes, comme celle que l'Europe vient d'adopter, ne tiennent pas davantage compte de ces retours d'expérience et continuent à exiger des normes aussi strictes, à un moment où il existe une volonté affichée par de nombreux pays de procéder à une uniformisation des réglementations. La récente étude du COSTEA (Comité scientifique et technique eau agricole) sur la gouvernance et la réglementation applicables dans le domaine de la réutilisation des eaux usées en agriculture, dans six pays aux situations hydriques très contrastées, met en évidence une grande disparité d'approches.
Ce benchmarking conduit les auteurs du rapport à préconiser que la réutilisation au sens d'une promotion de la circularité de l'eau soit intégrée à la gestion de l'eau dans son ensemble, et en particulier aux nécessaires mesures de sobriété ou encore aux nouveaux schémas de l'eau en ville (comme la séparation à la source). Ceci afin d'éviter que des effets néfastes, comme la mal-adaptation des agricultures, finissent par amplifier la raréfaction des ressources en eau et diminuer leur qualité. Pour répondre à ces enjeux, plusieurs initiatives sont en cours. Par exemple, en collaboration avec la SCP, les universités d'Aix-Marseille, de Perpignan et de Sfax, nous lançons des travaux de recherche sur le droit de la réutilisation des eaux usées, avec comme objectifs de faire un état des lieux, d'imaginer une réglementation intégrée promouvant la circularité de la ressource pour le futur et d'identifier la ou les trajectoires permettant d'atteindre la situation projetée à partir de la situation européenne actuelle.
B.M. : Rappelons que, pour le moment, la réglementation française se concentre sur un traitement unique qui satisfasse tous les usages, donc le plus exigeant. Ce genre de règle retire l'ensemble de ses responsabilités au maillon final de la chaîne, celui qui irrigue. Elle mériterait d'être réfléchie ou adaptée, par exemple pour éviter d'arroser un fourrage avec une eau de qualité A ou B, là où la qualité C est suffisante. Ce qui présente, en outre, l'intérêt de conserver beaucoup plus de nutriments et donc d'aller vers une économie circulaire bien plus performante.
Voir aussiPropos recueillis par Stéphanie Debruyne et Morgan Paglia
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L'arrêté du 28 juillet 2022 relatif au dossier de demande d'autorisation d'utilisation des eaux usées traitées précise comment évaluer les risques dans le dossier de demande d'autorisation de réutilisation. ↑
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Les cétacés en détresse sur nos côtes sont-ils condamnés à mourir ?
En 2022, on se souvient tous de l'orque Sedna qui remonta la Seine. Puis, ce fut au tour du béluga, de la baleine coincée dans l'embouchure de la Rance en février 2023, et du baleineau isolé dans un port en Martinique en avril 2023. Fin août 2023, c'est également un baleineau qui s'est retrouvé prisonnier dans le lagon à la Réunion, séparé de sa mère.
Leur point commun : ces cétacés étaient tous isolés et ont été découverts rapidement. Mais si certaines interventions se sont « bien terminées » (par exemple pour la baleine de la Rance), d'autres ont montré certaines limites dans la préparation et la mise en oeuvre de l'intervention, avec au final des issues tragiques (pour l'orque, le béluga et les baleineaux à la Martinique et à la Réunion).
Est-il possible de faire mieux pour sauver des cétacés en détresse ? Peut-on améliorer le taux de réussite des interventions de sauvetage en France ?
Le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires lance un groupe de travail national sur les mammifères marins en détresse, qui se réunira pour la toute première fois jeudi 14 septembre. L'objectif est de traiter de la gestion de ces mammifères en difficulté.
Des détresses très fréquentes sur nos côtes
En 1970, la France a créé le Réseau national échouages (RNE). Particulièrement actif, son but est de recenser l'ensemble des mammifères marins qui s'échouent sur les plages de la France continentale et d'outre-mer. En 2021, 1522 échouages de cétacés ont été rapportés au RNE en 2021 sur les côtes de l'hexagone, et 15 de plus sur nos côtes ultra-marines, soit 4 par jour en moyenne. Ce terrible chiffre ne prend pas en compte les captures dans les engins de pêche professionnelle estimées entre 2 et 7000 par an sur la côte atlantique.
Les causes des échouages peuvent être multiples : naturelles (virus, bactéries, âge avancé, séparation du groupe social, attaque d'un prédateur) ou résultantes d'une ou d'une combinaison d'activités humaines (pêcheries, collisions, pollution chimique, plastique, bruits sous-marins, dérégulation climatique).
Read more: Collision entre les orques et les bateaux : s'agit-il vraiment d'attaques ?
Toujours d'après le Réseau national échouages, seuls 3 % des cétacés étaient vivants lorsqu'ils ont été observés en difficulté. Dans ce cas, on peut envisager de les renflouer, c'est-à-dire de les transporter au large, si plusieurs conditions sont réunies, comme leur état de santé, leur poids, leur accessibilité. Il faut aussi s'assurer de la sécurité des opérateurs et des opératrices, et d'avoir des moyens humains et matériels suffisants.
Ça, c'est la théorie, mais que se passe-t-il réellement sur le terrain ?
Comment se passe le sauvetage d'un cétacé en détresse ?
Tout d'abord, le Réseau national échouages fait appel à son réseau et choisit généralement de confier la responsabilité de l'intervention au membre le plus près de la zone où a été vu le cétacé. Un référent·e est alors désigné·e pour gérer les opérations, en accord avec la préfecture ou de l'autorité administrative qui va sécuriser les lieux.
Commence alors la prise en charge de l'animal : identification de l'espèce et bilan de santé permettent d'évaluer ses chances de survie à court terme. Pour cela, un·e vétérinaire dresse un diagnostic clinique, qui peut s'avérer plus ou moins précis suivant l'accessibilité du cétacé. Ces éléments, même approximatifs, seront très importants pour choisir entre le ramener au large ou l'euthanasie.
Pour aider à cette décision, il est possible de faire appel à un·e ou des experts cétologues. Par exemple, pour le béluga, c'est Robert Michaut, chercheur québécois reconnu mondialement, qui avait été sollicité. Pour l'orque, Charlotte Curé, spécialiste internationale en bioacoustique, était venue proposer une solution intéressante utilisant des émissions sonores d'orques pour guider Sedna vers l'océan.
Immersion dans l'univers de Charlotte Curé, bioacousticienne, lauréate 2010. Source : Fondation de la Vocation.Anticiper des scénarios détaillés permettrait d'agir plus vite
Dans ces interventions, on a vu les opérateurs se retrouver à imaginer des solutions in situ dans le moment présent un point malheureusement plus négatif que positif, car, pour les cétacés en difficulté, qui ne peuvent pas vivre dans l'eau douce, qui ont faim, qui sont stressés et peut-être malades, chaque heure qui passe fait diminuer les chances de survie.
Read more: Les animaux, ces êtres doués de « sentience »
Les interventions sont également contraintes par la défense d'activités économiques et/ou la nécessité de sécurité des citoyens.
Enfin, la prise de décision peut aussi être ralentie par les discours disparates de différents acteurs, indépendamment de leurs expertises, qui mettent parfois en cause l'avis des autres ce qui empêche un consensus rapide et contribue également au stress de l'équipe en charge du dossier.
Pour éviter cela, la seule solution est d'envisager les interventions largement en amont et ne surtout pas les penser devant le cétacé en détresse.
En fait, la démarche proposée ici revient à copier celle des pompiers : lorsqu'un début de feu est constaté, ils ne dédient pas les 1ères heures qui font suite à l'alerte, par une réunion de travail pour envisager les actions à mener. Au contraire, ils ont déjà, en tête, des scénarios parfaitement réfléchis en amont et clairement décrits par étape. Ils les connaissent par coeur. Et même s'il y a toujours la possibilité de faire des adaptations ou de demander, une fois sur place, l'aide d'un·e spécialiste dans des cas particuliers, ce sont bien la réactivité et la rapidité qui déterminent le succès de leurs interventions.
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On devrait faire exactement pareil pour les cétacés : préparer dès aujourd'hui un très faible nombre de scénarios, tenant compte de l'espèce, du nombre de cétacés impliqués, de l'examen clinique avec l'établissement d'un catalogue préétabli de soins vétérinaires, et des conditions de mer. Les opérateurs et les opératrices pourront les apprendre et surtout s'entraîner pour être le plus efficaces et le plus rapides possible sur place.
Ainsi, c'est en préparant largement en amont les interventions qu'il sera possible d'appréhender, plus justement, l'ensemble des enjeux environnementaux, sanitaires et économiques pour traiter chaque cas particulier.
Inclure le grand public
Ces cétacés en détresse attirent le grand public, sensible et curieux. Plutôt que de tenir éloignées ces personnes de façon autoritaire, on peut regretter de ne pas choisir ces moments pour répondre à leurs questions et à leur angoisse/espoir. La préoccupation de leur sécurité est louable mais ne devrait pas interdire de les informer sur ces mammifères marins, leur vie, leur structure sociale, leur culture, et les raisons des échouages.
On a tout à gagner d'expliquer pourquoi il y a une intervention, et notamment en s'adressant aux plus jeunes pour leur montrer la fragilité des écosystèmes marins et la nécessité de les préserver. Il n'y a pas de raisons qu'inclure le public se passe mal, car du fait de l'empathie naturelle pour les cétacés, tout le monde a envie de voir, de parler, de se sentir inclus, comme lors de l'échouage d'une baleine à bosse aux Comores.
Quelle gouvernance internationale ?
Le nombre de cétacés en détresse pourrait augmenter dans les prochaines années puisque les pays continuent de structurer leur politique d'exploitation des océans, alors que les écosystèmes sont déjà en grande difficulté par la pression anthropique, qui entraîne une défaunation marine.
La poursuite de l'extension des aires marines protégées, dans les eaux territoriales françaises notamment, le moratoire sur l'exploitation minière des grands fonds, porté notamment par la France, et la signature à l'ONU du traité de protection de la haute mer montrent que des actions nationales et internationales raisonnables sont possibles. Il faut profiter de cette volonté de protéger nos océans pour aller encore plus loin, par exemple avec des régulations plus contraignantes des activités anthropiques qui fragilisent les cétacés et qui expliquent leur échouage.
En attendant, à cause de ce que nous faisons subir aux océans, il est de notre devoir, de porter assistance à ces mammifères marins en difficulté. Il existe, d'ailleurs, des formations proposées par la Commission baleinière internationale et des protocoles pour les sauvetages de cétacés dans d'autres pays, comme par le Marine Mammal Center ou par l'IFAW par exemple, desquels nous pourrions nous inspirer. L'objectif est de proposer, à partir de ce qui a été fait depuis 1970 en France, des scénarios adaptés pour, si cela est possible, améliorer les interventions et sauver, sinon tous les cétacés en détresse, le plus grand nombre. Cette démarche s'inscrirait dans notre volonté de faire plus et mieux pour les écosystèmes marins, et nous rendre l'espoir de croire en un océan durable.
Olivier Adam does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.
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